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Le Cercle des Voisins

Informe de l'atteinte à la dignité et aux droits humains que représente l’existence et le fonctionnement du «Centre de Rétention Administrative de Cornebarrieu», défend la libre circulation des personnes et dénonce le système mis en place pour l’expulsion des personnes privées de papiers.

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Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Source : Médiapart - Tomas Statius - 29/5/2020

Après des violences contre un mineur étranger à Calais, des gendarmes ont dénoncé des collègues, permettant une condamnation.

C’est une histoire calaisienne comme il y en a des tas d’autres. Une histoire de migrants qui croisent des policiers à la nuit tombée, après avoir tenté leur chance à la frontière. Dans ces histoires, trop souvent les exilés se plaignent de mauvais traitements. Coups, brimades, téléphones brisés, nourriture jetée et vol d’argent… C’est ce que décrit Suleman*, mineur afghan, dans une plainte au procureur de Boulogne-sur-Mer remontant à mars 2016, accompagnée d’un certificat médical et d’une carte indiquant où les violences se seraient déroulées.

Pour une fois, la plainte a fait du chemin. Car pour une fois, des membres des forces de l’ordre ont brisé l’omerta, d’après des informations obtenues par Mediapart.

En octobre dernier, à l’issue d’une enquête préliminaire confiée à l’inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN), trois militaires impliqués dans l’affaire de Suleman ont ainsi comparu devant le tribunal correctionnel de Boulogne-sur-Mer. À l’adjudant Raphaël S., il était reproché des coups : il a été condamné à trois mois de prison avec sursis (comme mentionné brièvement par La Voix du Nord), sans inscription au casier judiciaire.

À lui, ainsi qu’à deux camarades, les gendarmes Mikaël C. et Romain T., le parquet reprochait aussi des vols d’argent et la destruction de plusieurs téléphones portables appartenant à Suleman et ses amis. Tous les trois ont été relaxés, malgré les confessions de Mikaël C. pour ce qui est de la destruction de portable.

Depuis la condamnation, Mediapart a pu consulter l’intégralité de l’enquête préliminaire et se plonger dans cette affaire de violences pas comme les autres : lors de leurs auditions par l’IGGN, plusieurs gendarmes ont dénoncé des mauvais traitements et la destruction d’effets personnels de migrants de Calais.

Ce jour de janvier 2016, il est 23 heures passées quand des gendarmes de Saint-Nazaire, détachés à Calais, rejoignent leur hôtel en périphérie de la ville. La journée a été harassante. C’est l’époque de la « jungle », campement de plusieurs milliers d’habitants qui concentre tous les maux de la crise des réfugiés.

Sur le chemin, non loin du centre-ville, les gendarmes remarquent plusieurs ombres qui semblent se cacher derrière une voiture. L’endroit est connu pour être un point de rencontres d’exilés qui essayent de s’introduire dans le tunnel sous la Manche en direction de l’Angleterre. Il s’agit de Suleman et ses amis, les gendarmes les soupçonnent d’être en train de fracturer une voiture.

L’enquête établira qu’il n’en est rien : ils se dirigent simplement vers la « jungle » quand les gendarmes leur tombent dessus. Dans son témoignage, rédigé avec l’aide d’un traducteur et d’une bénévole de l’association la Cabane Juridique, Suleman s’explique : avant même de croiser la route des militaires, la soirée a été galère, le jeune homme se plaint d’avoir été aspergé de gaz lacrymogènes par des hommes qu’il pense être des policiers en civil. « Cela ne correspond à personne », grince un militaire, sur procès-verbal. À moins que ce ne soit ces groupes de calaisiens proches de l’extrême droite locale qui patrouillent la nuit aux abords de la jungle pour passer à tabac des migrants, tente ce gendarme. L’enquête ne répondra pas à la question. Les exilés sont rapidement appréhendés par le groupe de gendarmes et l’histoire aurait pu s’arrêter là sans le coup de sang de l’adjudant S.

Deux d’entre eux appartiennent à une autre compagnie appelée en renfort le soir des faits : le lieutenant Loïc H. et le maréchal des logis Denis W. Le dernier, le gendarme Mikaël C., faisait partie de la même troupe que l’adjudant S. Tous les trois se souviennent que ce soir-là, l’adjudant, sportif, a envoyé « un bon kick » au niveau de l’épaule de Suleman, 16 ans. Puis un coup de poing, complète le gendarme C.

Leur témoignage est proche de celui du jeune homme, et du récit qu’il fait au médecin chargé de l’ausculter lors de sa visite aux urgences de l’hôpital de Calais plus tard dans la soirée. Il se plaint alors d’une douleur au niveau de l’omoplate, « sans luxation », indique le certificat que Mediapart a pu consulter. Un autre médecin estimera à 1 jour d’ITT ses blessures.

Pourquoi ce geste de l’adjudant S. ? Personne n’en sait rien. L’intéressé nie encore aujourd’hui, fait savoir son avocat, Me Cottigny. Ses états de service étaient irréprochables… si ce n’est un signalement pour des faits de violence lors d’une audience au tribunal correctionnel de Paris un mois avant les faits. D’autres collègues invoquent les conditions de travail dans le Calaisis et les missions harassantes.

L’affaire Suleman jette également pour la première fois la lumière sur un autre délit longtemps dénoncé par les associations de défense de migrants (dont Amnesty International et l’Auberge des Migrants), jamais étayé dans le cadre d’une enquête judiciaire : la destruction des téléphones des migrants par les forces de l’ordre. Le gendarme C. reconnaît avoir brisé l’un d’entre eux : « On savait que les migrants s’appelaient entre eux pour avertir de la présence des forces de l’ordre. Sans arrêt, lorsque nous arrêtions des migrants, leur téléphone sonnait. Par exemple, si l’on arrêtait un groupe de migrants, un autre était averti de notre présence pour échapper à notre vigilance. Du coup, c’est un peu pour cette raison que j’ai jeté le téléphone derrière moi au lieu de le rendre à son propriétaire. »

L’homme plaide le geste d’humeur et affirme ne pas avoir répondu à une consigne de ses supérieurs. À l’audience, il demande pardon. Il a été relaxé par le tribunal.

Il n’est pas le seul, à en croire le lieutenant H. et le maréchal des logis W., qui se souvienne avoir vu plusieurs téléphones brisés aux pieds de Suleman et de ses amis. L’enquête ne permettra pas d’étayer leurs déclarations.

D’après les documents consultés par Mediapart, c’est silence radio dans le reste de la compagnie. L’ensemble des gendarmes se rangent derrière leurs camarades et ne s’expliquent pas le témoignage dissonant de trois des leurs.

Me Cottigny, l’avocat de l’adjudant S., regrette aujourd’hui une enquête « peu poussée » et l’absence de confrontation entre son client et ses détracteurs : « On s’est posé la question de faire appel mais il voulait tourner la page. » La condamnation est donc définitive. Mais l’homme est toujours gendarme, nous confirme la direction générale de la gendarmerie nationale.

Suleman, lui, a rejoint l’Angleterre. Il n’était pas présent au tribunal et n’a pas pu être interrogé au cours de l’enquête. Contacté par Mediapart, le cabinet du préfet du Pas-de-Calais, Fabien Sudry, se refuse quant à lui à tout commentaire « à propos d’une décision judiciaire ».

 

 

 

Vite dit

06/06/2022 - Archarnement administratif, ca suffit !

« Comment peut-on croire qu'on sera plus heureux en faisant du mal à d'autres ? » (Hervé le Tellier – L'anomalie)

Ce mardi 7 juin 2022, Gideon est convoqué au tribunal judiciaire de Toulouse. Combien de juges a-t-il vu depuis le jour où il a été interpellé au commissariat de Pamiers ?

Au moins 7.

Le 3 mai, ce jeune gabonais de 18 ans, a été placé au centre de rétention de Cornebarrieu pour un vol prévu le 4 mai vers Libreville. Ce placement rendu possible par la loi (Article L 740-1 CESEDA) a été concrétisé par la préfecture de l'Ariège.

Il a refusé d'embarquer car toute sa famille vit en France de manière régulière. Il est scolarisé au lycée de Lavelanet et n'a plus du tout d'attache au Gabon.

Le 5 mai, le juge de la liberté et de la détention (JLD) décide de la prolongation de sa rétention (Article L742-3 CESEDA) permettant ainsi à l'administration d'organiser un nouvel 'éloignement'.

C'est le 27 mai qu'aura lieu cet 'éloignement' mais cette fois avec des techniques coercitives musclées (GTPI). Monté de force dans l'avion, Gidéon sera ligoté et molesté jusqu'au moment où le commandant de bord exigera son débarquement.

Mais s'opposer à son expulsion est un délit. Gidéon passera le soir même devant le procureur en CRPC (Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité) et sera puni d'une peine de prison de 3 mois avec sursis et 5 ans de mise à l'épreuve.

A 100 km de Toulouse, la préfète de l'Ariège reste inflexible : Gidéon doit rester enfermé pour être expulsé.

Le 2 juin, la juge JLD rendra un avis légèrement plus conciliant en lui permettant de rejoindre famille mais en l'obligeant à signer tous les jours au commissariat.

La préfecture de l'Ariège n'a pas apprécié cette décision. Elle a fait appel et l'audience aura lieu ce mardi 7 juin à 9h45 au palais de justice de Toulouse.

Si vous venez à cette audience, vous ne verrez pas le ou la signataire de cet appel. Il ou elle se fera représenter par un ou une porte-parole bien obéissant.e.

On sait qu'un nouveau vol a été demandé par la préfecture et si Gidéon le refuse, il risque cette fois 3 ans d’emprisonnement et une interdiction du territoire de 10 ans.

Depuis ses 18 ans, Gidéon vit sous la menace d'une arrestation, d'une expulsion !

Ce 6 juin, c'est son anniversaire. Il a 19 ans.

 

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